Crying helps me slow down and obsess over the weight of life's problems.
Résumé :
Vice-versa vient de l’initiative du réalisateur de "Monstres et Cie" et de "Là-haut", Pete Docter, quand en 2009, il remarque que sa fille devenait "plus calme et réservée" et se demanda ce qu’il se passait dans sa tête. Pour l’accompagner dans la réalisation et l’écriture, Docter invite Ronnie del Carmen, qui accepte. Pour l’écriture, tous deux s’inspirent de leurs propres histoires et expériences personnelles, tout en discutant avec des psychologues et des spécialistes comme Paul Ekman et Dacher Keltner. Ces derniers disent que le film met l’accent sur la manière dont les émotions organisent nos pensées et nos vies sociales, en particulier sur le rôle de la tristesse dans l’établissement des liens. Dans les premières versions du projet, vingt-sept émotions étaient prises en compte, mais pour des raisons évidentes de simplicité, leur nombre a été réduit à sept. Cette liste fournie par Ekman est composée de : colère, peur, tristesse, dégoût, mépris, surprise et bonheur. Docter a supprimé la "surprise" pour sa similitude avec la "peur", il a également supprimé le mépris et rebaptisé le "bonheur" par la "joie".
En 2010, Pete Docter recrute une petite équipe pour développer l’intrigue et concevoir les personnages dans un délai de douze mois. Afin de promouvoir une contribution diversifiée, la moitié de l’équipe scénaristique était composée de femmes, à une époque où l’industrie de l’animation était majoritairement masculine. Docter, qui supervisait les avancées, a rejeté quelques idées, notamment une qui voulait que le personnage de Riley tombe dans une profonde dépression. La création des storyboards a duré deux à trois ans avec des projections destinées aux leaders créatifs de chez Pixar qui supervisent le développement de tous les films. Seuls Docter, Josh Cooley et Meg LeFauve seront crédités au scénario.
L’enregistrement des voix a commencé en 2013 et s’est terminé un an plus tard. Pour la distribution, l’idée principale était de choisir des acteurs et actrices qui se rapprochaient des personnages en termes de personnalité. Côté émotion, Phyllis Smith a été la première choisie pour le personnage de "Tristesse", elle qui n’était pas sûre de réussir dans le doublage d’un film d’animation. Le producteur Jonas Rivera a été convaincu de son choix après l’avoir vue dans "Bad Teacher". Bill Hader, encore au Saturday Night Live, a été choisi pour le rôle de "Peur" et il s’est inspiré à la fois de l’acteur Don Knotts et du personnage de "Mr. Bean". Pour le rôle de Riley, Kaitlyn Dias a été choisie après que les responsables de son casting ont dit d’elle qu’elle était "touchante" et d’une "honnêteté déchirante". Le reste de la distribution est complété par Amy Poehler en "Joie", Lewis Black en "Colère", Mindy Kaling en "Dégoût" et Richard Kind pour "Bing Bong".
Pour l’animation du long-métrage, environ 48 animateurs et 350 artistes (dont 35 éclairagistes et 10 maquettistes) et techniciens ont été impliqués dans la production. Deux équipes d’animation ont été constituées, une pour la séquence abstraite et l’autre impliquée dans la simulation de foule. Pour les besoins de l’animation, une nouvelle technologie pour localiser chaque partie du corps humain a été utilisée. Pour son projet, Docter imaginait des personnages chargés d’émotions, capables de "pousser le niveau de caricature" tant dans le design que dans le style de mouvement. Pour ce point en particulier, ils ont imité les styles d’animation de Tex Avery et Chuck Jones. Le personnage de "Joie" a posé quelques soucis aux artistes, notamment son aura qui a pris huit mois de travail, avec un manque de temps et de budget. Pour finaliser son look, Docter et six autres créateurs ont passé dix-huit mois. Au total, la création de "Joie" a pris trois ans, tandis que le travail sur l’animation a duré un an et demi. Pour la musique, l’équipe du film s’est tournée vers Michael Giacchino, déjà à l’œuvre sur "Les Indestructibles", "Ratatouille", "Là-haut" et "Cars 2".
"Vice-versa" devait sortir initialement le 30 mai 2014 aux États-Unis, mais a été repoussé au 19 juin 2015. Il a fait ses débuts au 68e Festival de Cannes en "Hors compétition" et a reçu une ovation de huit minutes. Il fait partie des premiers longs-métrages à adopter le format "Dolby Vision" dans certaines salles. À sa sortie, il a été acclamé par la critique pour son savoir-faire général, son scénario, son sujet traité, son intrigue et ses performances vocales. Lors de la 88e cérémonie des Oscars, le film a été nominé pour le meilleur scénario et est reparti avec le prix du meilleur film d’animation. Il a également été nominé et récompensé dans d’autres cérémonies majeures. Le National Board of Review et l’American Film Institute ont classé "Vice-versa" parmi les dix meilleurs films de 2015. Sur Rotten Tomatoes, le film est certifié "Fresh" avec 98 % pour 384 critiques et 89 % pour plus de 100 000 spectateurs. Sur Metacritic, il obtient la certification "Must-See" avec une note de 94 sur 100 pour 55 critiques, tandis que sa note CinemaScore est de A. Pour un budget de 175 millions de dollars (hors marketing), le film a récolté 858 millions dans le monde et 356 millions aux États-Unis. En France, le film a cumulé 4,5 millions d’entrées. Après les annonces des nominations aux Oscars, en janvier 2016, Pete Docter admet avoir des idées pour une suite. Cette dernière a été annoncée en 2022 et commencera sa production durant la même période. "Vice-versa 2" sortira le 19 juin 2024 chez nous et une série télé a également été annoncée entre-temps.
Mon avis :
Afin de me préparer à la sortie du très attendu "Vice-versa 2", il était temps que je revoie le premier après les neuf ans qui me séparent de mon premier visionnage. Pour sa suite, j’avoue ne pas être spécialement emballé, mais j’irai évidemment le voir. Je développerai un peu plus mon manque d’enthousiasme à sa sortie. Sur les 195 films traités (au moment où j’écris ces lignes), je n’ai parlé que de très peu de Pixar : "Toy Story 4", "Soul" et "Coco". 3 sur 27 c’est peu alors que j’adore leurs productions. Est-ce que Vice-versa fait partie des meilleurs Pixar ? Je dirais oui sans aucune hésitation, il se hisse facilement dans le haut du panier qui est joliment fourni. Il y a des films qui, lorsque je m’apprête à les revoir après des années, me font appréhender un peu. Le temps est passé et ma perception d’une œuvre peut avoir changé. J’appréhende le fait de ne plus apprécier un film que j’ai aimé par le passé. Heureusement, ici, cette appréhension pré-visionnage n’était pas présente, car je me doutais (Pixar oblige) que la magie fonctionnerait à nouveau.
Avec "Vice-versa", nous sommes face à une histoire magnifique et touchante, portée par une aventure autour des émotions intelligemment intégrées au récit. On prend un plaisir fou à suivre la vie de Riley à travers ses émotions personnifiées, très attachantes. Celle qui a volé mon cœur est, comme pour beaucoup de monde, "Tristesse". Qu’on le veuille ou non, c’est elle la vraie héroïne de cette histoire. Certes "Joie" est plus mise en avant, mais j’admets avoir été souvent agacé par son attitude, malgré ses bonnes intentions. Ça me rappelle un peu la dynamique Anna/Elsa dans "La Reine des neiges", la première étant clairement l’héroïne de l’histoire. Côté humain, il est assez facile de s’attacher à Riley, qui est une simple fille bloquée dans l’idée de devoir toujours être joyeuse, peu importe les circonstances.
Personnellement, je trouve le rythme vraiment réussi. On passe sans problème de péripétie en péripétie, sans s’ennuyer une seconde. Cela, c’est grâce à l’imagination fournie par les équipes du film, notamment avec l’envers du décor du cerveau, avec les souvenirs liés aux émotions, la réalisation des rêves, la notion de l’abstrait, les émotions des parents et plein d’autres encore. Avec un tel concept, on aurait pu croire qu’ils allaient tourner en rond, mais ce ne sera pas le cas. Au contraire, ils creusent le plus possible sans que ce soit indigeste. Visuellement, le film est là aussi une réussite. De prime abord, le design des émotions est assez "simpliste", mais ces dernières fourmillent de petits détails. J’ai eu un coup de cœur pour leurs textures, notamment celle de "Joie". Les palettes de couleurs proposées sont magnifiques et le travail sur les lumières sublime pas mal de plans. Il faut saluer la séquence abstraite qui, en plus d’être drôle, est très jolie également. Très bonne trouvaille.
Bien sûr, les visuels comptent beaucoup dans un Pixar, mais ce n’est pas la seule chose que l’on retient en général avec eux. Souvent, ces films sont accompagnés de beaux messages et de thèmes variés. Ici, "Vice-versa" est porté par des messages joliment transmis sur les émotions. Les thèmes principaux sont la gestion des émotions et le passage de l’âge. J’aime le fait que le film mette en avant le côté néfaste de refouler ses sentiments "négatifs" et que finalement, la joie ne serait rien sans la tristesse. Ces émotions se complètent et le long-métrage aborde l’importance de mélanger ces dernières et que tout n’est pas noir ou blanc. Même le sujet de la dépression est abordé ici. Un sujet déjà tabou pour les adultes en 2015, mais encore plus pour les enfants. C’est tout à l’honneur de Pete Docter et ses équipes de mettre cela en avant. Aujourd’hui, on en parle un peu plus facilement, mais il y a neuf ans, j’aime à croire que le film aura aidé quelques personnes sur ce point.
Évidemment, on ne peut pas parler de film Pixar sans évoquer l’aspect émotionnel. On peut dire sans sourciller que le film d’aujourd’hui est facilement l’un des plus émouvants avec "Là-haut" et "Coco". J’ai encore pleuré durant la fameuse scène dont je ne dirai rien pour éviter le spoil. Si vous avez vu le film, vous savez de quoi je parle. L’un des aspects les moins marquants du film, c’est sa bande originale. Les musiques sont jolies, mais pas réellement marquantes, même si ça n’empêche pas Michael Giacchino de nous émouvoir un peu plus durant les séquences émouvantes. Pour conclure, parlons un peu du casting français que j’ai trouvé très réussi. C’est simple, quand on n’associe pas une voix d’un personnage à un acteur ou une actrice, c’est que l’illusion est réussie et l’objectif est rempli. Par exemple, quand j’ai vu que Gilles Lellouche (Colère), Mélanie Laurent (Dégoût) et Pierre Niney (Peur) étaient à la distribution, j’étais surpris ! J’admets être curieux de découvrir le film en VO pour entendre Bill Hader, Kyle MacLachlan, Mindy Kaling et Phyllis Smith.
Voilà pour mon avis sur "Vice-versa" de Pete Docter. Il faut admettre qu’il est difficile de prendre en défaut ce 15e long métrage de Pixar. Je trouve même qu’il est assez dur de trouver des choses à dire pour les Pixar de cette qualité. On tourne vite en rond, en répétant inlassablement les mêmes qualités à mettre en avant. Certes, les Pixar sont des valeurs sûres (avec un côté doudou), mais il y a peu de prise de risque. Que ce soit visuellement ou narrativement. Pour avoir cela, il faut se tourner vers d’autres studios, parfois plus indépendants et moins restreints par une grosse machine comme Disney. Autant je n’appréhendais pas mon nouveau visionnage de "Vice-versa" autant, c’est le cas pour sa suite. Je crains qu’elle ne soit faite pour les mauvaises raisons, à savoir : faire de l’argent facile. En tout cas, le film se termine sur une fin ouverte avec un bon potentiel. À voir si le potentiel sera transformé. Réponse dans quelques semaines.
(Rédigé le 07/06/2024)